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Feuilleplume
2 novembre 2015

PNJ IRL #22

Une nouvelle inspirée de l'univers de Fabien Fournier, plus particulièrement de Néogicia et de Noob, mais qui peut aussi se lire sans connaître ces deux oeuvres.

Le destin étrange d'un... personnage de jeu vidéo ?

Pour les néophytes : PNJ = "personnage non joueur" d'un jeu vidéo, qui donne généralement une quête au héros incarné par le joueur et répète toujours les mêmes phrases.
IRL = "in real life" ("dans la vie réelle")

DEBUT

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Le processus s'enclenche. Cette fois, il est trop tard pour reculer. Des flots de pouvoirs incompatibles par nature convergent dans mon esprit. La moindre erreur de calcul, la moindre dissonance dans cette alliance impossible, et ma conscience sera anéantie définitivement. Aucune de mes copies de sauvegarde n'y résistera.

Mes facultés mentales sont mobilisées jusqu'à leur extrême limite. J'ai l'impression que je vais exploser et me dissoudre sous la pression des forces impérieuses qui me traversent, et bien que je ne sois en cet instant qu'un ensemble de données numériques, J'AI SI MAL !

Quand tout s'arrête brusquement, je me sens tellement vide que je ne sais plus si j'existe encore ou non. Heureusement, cela ne dure pas. Des pensées hésitantes et informelles émergent de nulle part, se rassemblent, se renforcent, jusqu'à ce que je prenne conscience que j'existe bel et bien, à la fois dans une base secrète impériale, dans un personnage de jeu vidéo, dans l'immensité foisonnante d'Internet et dans...

J'ouvre les yeux. Ma vue un peu trouble se stabilise très vite et je découvre un tout nouveau décor, celui d'un appartement banal mais extraordinaire, car il est situé quelque part sur une autre planète. La Terre. Mon deuxième monde natal.

Un peu inquiète, je teste l'intégrité de mes facultés mentales. Rien à signaler dans Horizon, où un Pyromancien vient d'accepter d'aller sauver Cadwell. Je ressens l'habituelle bouffée de reconnaissance à son égard. C'est la routine aussi du côté des programmeurs du jeu, qui exercent leur surveillance coutumière des joueurs. J'éprouve un pincement au cœur en me reconnectant à ma copie dissimulée dans les installations de la base impériale. Et si les chercheurs qui scrutent le portail avaient repéré quelque chose d'anormal ? Heureusement pour moi, ce n'est pas le cas. Tout est calme dans le laboratoire. Mon corps olydrien poursuit sans encombre sa tâche de catalyseur de puissance.

Emportée par le bonheur d'avoir réussi, j'éclate de rire, et j'entends ainsi ma voix pour la première fois. L'étrangeté de cette expérience fait frissonner mon corps terrien tout neuf. Je résiste à grand peine à l'envie de me lever d'un bond et d'entamer une danse de triomphe : il faut d'abord que je vérifie que tout va bien, que je ne suis pas dotée d'un troisième bras fluorescent au milieu du dos ou de je ne sais quoi de tel. La magie est parfois capricieuse...

A priori, je ne détecte rien d'anormal, ni intérieurement ni extérieurement ; du moins, rien de flagrant. Tout paraît à la bonne place, sans ajout superflu. Je n'ai plus qu'à contrôler les détails dans un miroir. Il y en a sûrement un dans la salle de bain de ce logement.

J'entreprends donc, avec prudence, de m'asseoir puis de me lever. Je constate avec soulagement que cela ne déclenche pas de réactions déplaisantes telles que vertiges, nausées ou autres joyeusetés du même genre. Mon esprit semble s'être immédiatement adapté à ce corps. Ce n'est pas si étonnant, en fin de compte, puisqu'il y a seulement quelques jours, il était tout à fait classiquement situé dans mon corps d'origine. Ce n'est pas comme si je n'avais jamais été qu'une pure conscience virtuelle.

Je ne m'étais pas trompée : il y a bien un miroir dans la salle de bains, un grand miroir qui permet de se voir en pied. J'examine mon reflet avec la plus grande attention, non seulement pour m'assurer que mon apparence ne présente aucune bizarrerie mais aussi, et surtout, pour me familiariser un peu avec mon nouveau visage. Il y a fort à parier que j'aurai toujours une petite impression d'étrangeté en me voyant, même dans de nombreuses années !

Satisfaite par mon examen, j'enfile les vêtements que j'ai générés. Pour les concevoir, je me suis inspirée de ce que portent de très nombreuses Terriennes, d'après ce que j'ai pu en voir en consultant les meilleures ventes des magasins de vêtements sur Internet et en m'infiltrant dans les réseaux de vidéosurveillance de plusieurs grandes villes.

Pour finir, je récupère les divers documents qui me donnent une réalité administrative, aussi indispensable que ma réalité physique pour me fondre parfaitement dans ce monde. Et si j'allais tester ma carte bancaire ? Cela me permettra également de repérer les environs ! Par chance, les vacanciers dont j'occupe l'appartement ont laissé un double de leurs clefs accroché à un clou près de la porte. Je n'aurai pas à me soucier du risque qu'un voisin me surprenne en train de sortir ou de rentrer par une fenêtre, et au cas où l'un d'eux me poserait des questions sur ma présence, je pourrai prétendre que je viens m'occuper des plantes en l'absence de mes cousins, qui m'ont évidemment confié leur clef.

Pour savoir où aller, je connecte mon esprit à la carte des environs. Il ne me faut guère de temps pour localiser ce que les Terriens appellent un distributeur automatique de billets, ainsi qu'une boutique de vêtements pour agrandir un peu ma garde-robe plutôt sommaire, et une supérette où acheter de quoi manger.

Tout se passe pour le mieux ; j'arrive même à éviter de fixer tout ce que je découvre d'un air niais. J'ai bien fait de regarder des vidéos qui m'ont donné un aperçu du quotidien de mon nouveau lieu de vie, sinon je serais passée pour une ahurie qui ouvre de grands yeux stupéfaits devant tout ce qui l'entoure !

Je reviens donc dans mon logement temporaire les bras chargés de victuailles aussi alléchantes qu'intrigantes, de plusieurs tenues pour pouvoir changer de vêtements les prochains jours. Je sors d’une de mes poches un portefeuille plein d'un gros paquet de billets, dont je dépose une partie sur la table du salon, en guise de dédommagement pour mes hôtes involontaires. Avec tout cet argent, ils auront de quoi repartir en vacances, mais peut-être en faisant preuve de plus de prudence, cette fois !

Le soir tombe paisiblement. Je décide de passer une soirée terrienne typique, à grignoter divers aliments en regardant la télévision. Cela me confirme mes capacités d'adaptation à mon nouveau mode de vie, car au bout de quelques heures, je m'endors sur le canapé devant l'écran.

 

PAGE SUIVANTE... et dernière !

 

Incursion dans un autre monde

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